La mèche de la crise de Mai-68 est allumée au soir du vendredi 22 mars par un groupe d'étudiants qui décide d'occuper le campus de Nanterre pour protester contre l'interpellation d'étudiants hostiles à la guerre du Vietnam.
Ces étudiants progressistes déclenchent ainsi d'une façon spontanée et sans en imaginer l'ampleur, la triple crise étudiante, sociale et politique de Mai-68 qui devait bouleverser la société française.
Les buts "révolutionnaires" du "Mouvement du 22 mars" sont aussi flous que les causes psychologiques du malaise étudiant, celui d'une génération de l'après-guerre qui remet en cause la société de consommation, fille de la prospérité économique.
Installée dans la croissance et la monarchie gaullienne, "la France s'ennuie" et ses étudiants en nombre croissant rêvent de révolution et de liberté. Ils commencent par abattre les séparations entre les cités universitaires des filles et des garçons.
Au mois de janvier, le ministre de la Jeunesse et des Sports François Missoffe, venu inaugurer la piscine du campus, est pris à partie par un jeune homme aux cheveux roux: Daniel Cohn-Bendit, étudiant allemand en sociologie, qui l'interpelle sur les questions de sexualité.
"Si vous avez des problèmes sexuels, allez vous tremper dans l'eau froide", rétorque le dignitaire gaulliste.
Dans la soirée du vendredi 22 mars, 300 étudiants - dont Cohn-Bendit-, se réunissent dans l'amphithéâtre de Nanterre pour protester contre l'arrestation d'étudiants militant contre la guerre au Vietnam.
Puis ils occupent la tour administrative de l'université installée sur des terrains vagues, derrière le nouveau quartier d'affaires de la Défense.
Sur les murs, leur premier slogan : "Non à l'Université bourgeoise".
"C'était la première occupation de fac en France", se souvient l'architecte Roland Castro, alors responsable de l'Union des jeunes communistes marxistes-léninistes de Nanterre.
Les cours sont suspendus jusqu'au 1er avril pour éviter l'occupation de la faculté, annoncée pour le 29 mars.
Les étudiants se replient sur la Sorbonne et y occupent le grand amphithéâtre.
Le 2 mai, après plusieurs incidents sur le campus, Nanterre est fermée.
Le 3 mai, la Sorbonne est évacuée par les forces de l'ordre.
De violents incidents éclatent dans la nuit suivante au Quartier Latin qui se soldent au matin par 600 interpellations.
"Mai 68" est en route.