TEMOIGNAGE
Grâce à la solidarité de ses collègues,Christophe Germain a pu bénéficier en 2009 de 170 jours de RTT pour pouvoir s'occuper jusqu'au dernier souffle de son enfant malade.
De cette histoire est née une proposition de loi,votée ce mercredi par les députés.2008 : la nouvelle tombe comme un couperet pour Lydie et Christophe Germain.
Leur fils de 10 ans,Mathis,est atteint d'un cancer.
La course contre la montre commence,les rendez-vous médicaux s'enchaînent entre Paris et Saint-André-le-Puy,dans la Loire,où ils résident.
Mathis doit subir une transplantation hépathique du foie.
Après avoir épuisé tous ses congés payés et ses RTT pour rester auprès de son fils,Christophe,plasturgiste chez Badoit,à Saint-Galmier,enchaîne avec un arrêt maladie de trois mois pour "accompagnement d'un enfant gravement malade".
Mais à l'issue de cet arrêt,il est contrôlé par la Sécurité sociale
"J'ai refusé de tricher" "Lors de ce contrôle,on m'a fait comprendre que c'était mon enfant qui était malade et non moi et qu'il fallait que je reprenne le travail.
A cette époque,je ne demandais que quelques jours supplémentaires car mon fils commençait à aller un peu mieux suite à sa transplantation.
Ce Monsieur m'a coupé mes droits un lundi,donc je suis retourné travailler ce même lundi,poursuit-il.
Je n'avais pas le choix,ma femme ayant stoppé son travail pour être auprès de notre fils et ne bénéficiant plus que de l'AJPP (: Allocation journalière de présence parentale)".
A ce moment-là,Christophe sait qu'il peut se mettre en arrêt pour dépression,par exemple,pour gagner un peu de ce temps qu'il n'a plus auprès de son fils.
Mais il s'y refuse.
"Je n'ai pas triché avec le système,parce que je n'avais pas envie de m'inventer une maladie.
Et parce que j'avais un fils qui ne trichait pas non plus,qui se battait, qui ne baissait pas les bras..."
170 RTT collectés par ses collègues Lors de son retour chez son employeur,l'incompréhension domine parmi ses collègues.
Rapidement,l'idée germe : Christophe n'a pas besoin d'argent mais de temps,alors on va lui en donner.
A l'initiative de son chef de service,les salariés se mobilisent et récoltent pas moins de 170 jours de RTT en l'espace de 15 jours.
"C'était une première pour notre entreprise,mais devant un tel élan de solidarité,notre directrice a tout de suite donné son accord",se souvient Christophe.
Dans le même temps,l'espoir renaît pour Mathis.
Pendant quatre mois son foie fonctionne à nouveau et Christophe reste au travail,ne prenant des jours que de temps en temps.
Mais en septembre 2009,les métastases reviennent.
"On nous a dit que Mathis était condamné,qu'il entrait dans une phase de fin de vie.
C'est à ce moment que les jours que j'ai eus ont pris tout leur sens, raconte Christophe la voix tremblante.
J'ai pu être auprès de mon fils,24 heures sur 24,sans me soucier de mon travail ou de mon salaire,j'ai pu,grâce à ce temps offert,mettre en place une hospitalisation à domicile pour mon enfant parce qu'il ne voulait plus retourner à l'hôpital.
J'ai pu vivre avec mon fils tous ses derniers instants.
Voilà à quoi ce temps a servi".
Depuis,deux années ont passé.
Christophe a repris son travail chez Badoit.
"Quand vous perdez un enfant,votre vie s'arrête.
Il faut repartir.
Et pour repartir,retourner au travail dans une entreprise qui a tout fait pour vous aider,ça vous aide énormément".
"Pas une solution miracle",mais "une pierre à l'édifice"Touché par cette histoire,Paul Salen,député de la Loire,a déposé une proposition de loi visant à encadrer ce type d'initiative solidaire de don de RTT.
Le texte,approuvé mercredi après-midi par les députés,stipule qu'"un salarié peut,sur sa demande et en accord avec l'employeur,renoncer anonymement à tout ou partie de ses jours de repos non pris au bénéfice d'un autre salarié de l'entreprise qui assume la charge d'un enfant âgé de moins de 20 ans atteint d'une maladie,d'un handicap ou victime d'un accident d'une particulière gravité rendant indispensables une présence soutenue et des soins contraignants".
Un certificat médical attestant de la gravité de la maladie et de la nécessité d'une présence soutenue auprès de l'enfant est exigé pour que fonctionne le dispositif,qui devrait s'appliquer aussi à la Fonction publique.
Christophe et Lydie seront présents dans l'enceinte du Palais Bourbon au moment de la discussion du texte.
"Il existe des choses comme l'AJPP dont a bénéficié ma femme,mais ces aides ne sont pas suffisantes financièrement car elles correspondent à un forfait et non à votre salaire,explique Christophe.
C'est déjà bien,mais ce n'est pas suffisant.
Cette proposition de loi n'est pas une solution miracle mais c'est une pierre apportée à l'édifice,un début de solution parmi beaucoup de choses qui restent à faire pour accompagner la fin de vie".
L'association qu'il a créée avec son épouse à la mort de leur fils a déjà permis d'aider une vingtaine d'autres couples en France.
"Ce sont toujours 20 enfants qui ont,à leur tour,bénéficié de la présence de leurs parents jusqu'au bout,constate Christophe.
Certes,il y a une faille criante de l'Etat,certes,il y a un manquement.
Mais,en attendant,doit-on faire comme si rien ne s'était passé chez Badoit ?
Doit-on laisser passer ce geste de solidarité dont j'ai pu bénéficier ?" Et de conclure : "Mathis a mené le combat pendant 18 mois.
Maintenant,c'est à nous de le poursuivre".
Si la loi est votée,il est prévu de l'appeler Loi Mathis.
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