Dix heures de garde à vue pour avoir roulé sur le pied d’une proche de Nicolas Sarkozy.
Présentée comme ça, l’étrange affaire révélée ce jeudi matin par RTL suscite la polémique.
Est-ce pour autant une procédure hors norme?
Les faits d’abord.
Mardi à 17h, avenue Denfert-Rochereau dans le 14e arrondissement parisien, un artiste-peintre de 78 ans roule accidentellement sur le pied d'une fillette de 8 ans qui est en train de traverser.
Alors que la petite est transportée à l’hôpital pour des examens, notre peintre est embarqué par la police sur réquisition d’un magistrat du parquet de Paris.
Après des dépistages d’alcoolémie et de drogue, il ne sortira de garde à vue qu’à deux heures du matin, mercredi.
La fille de la demi-sœur de Nicolas Sarkozy
Au commissariat, on apprend que l’enfant blessé, qui finalement s’en tirera avec un gros hématome, est la fille de la demi-sœur de Nicolas Sarkozy.
«J’ai bien compris en garde à vue que je n’avais pas roulé sur n’importe qui», dira le peintre, qui pointe ainsi une coïncidence troublante entre la durée importante de son séjour chez les policiers et le nom de sa victime.
Deux semaines après l’affaire de la villa corse de Christian Clavier, une conclusion semble s’imposer: il ne fait pas bon d’importuner les proches de Nicolas Sarkozy, voire de leur rouler dessus.
Cette assertion est-elle justifiée?
Un officier de police relativise: «C’est une procédure classique en cas de délit. La fillette était sur un passage piéton, l’homme a commis une faute de conduite. Il y a une non-observation des règles de prudence, ce qui est répréhensible. Il a été placé en garde à vue le temps qu’on procède aux examens de la fillette et aux dépistages sur lui.»
Mais pourquoi cela a-t-il pris autant de temps?
«Malheureusement, cela prend beaucoup de temps pour faire les dépistages au service spécialisé de l'hôpital de l’Hôtel-Dieu explique l’officier, c’est souvent long et pénible.»
«Cela n’a pas eu de conséquences sur la procédure»
Et si c’est un proche de Nicolas Sarkozy?
«Les policiers ont été informés très rapidement de ça, il y a eu pas mal de coups de téléphone au commissariat, confie l’officier. Quand le membre d’une famille connue est concernée, ça provoque toujours ce genre d’animation. Mais ça n’a pas eu de conséquences sur la procédure, qui est celle d’un accident de la circulation avec une sérieuse faute de conduite. Tout ça n’a rien à voir avec l’affaire Clavier, où il y a eu une intervention directe du ministère de l’Intérieur.»
Un policier reconnaît que le peintre «a pu voir que ça vibrionnait au commissariat. Mais vous savez, quand on passe autant de temps en garde à vue et qu’on apprend qu’il n’y a pas eu de conséquences graves... nous avons souvent des récriminations qui remontent, qu’il y ait une personne connue concernée ou non.»
Secrétaire général de l’Union syndicale de la magistrature, Laurent Bedouet invite à la prudence.
«Tout dépend vraiment de l’appréciation des policiers sur l’infraction.
S’ils jugent qu’il y a un défaut de maîtrise du conducteur, qu’il a un comportement bizarre, des yeux brillants, ils peuvent l’embarquer pour un contrôle d’alcoolémie.
La garde à vue concerne les délits: coups et blessures involontaires, délit de fuite...
Mais la frontière est parfois ténue entre la contravention et le délit, il y a des histoires de ce type tous les jours en France et en Navarre.»
On peut donc finir par hasard en garde à vue, coup de fil du Président ou pas.