Les éponges constituent l’embranchement (vraisemblablement paraphylétique) des Spongiaires et sont des animaux sans organes ou appareils bien définis.
Leur corps n’est formé que par deux couches de cellules (ectoderme et endoderme).
Leurs cellules, animales, sont hétérotrophes, c’est-à-dire qu'elles doivent se procurer de la matière organique à partir d'autres organismes.
Longtemps considérées comme des végétaux, ce sont des animaux possédant des caractères très primitifs ; certains zoologistes voient dans ces organismes une étape entre les états uni- et pluricellulaires.
De répartition mondiale, les éponges ont colonisé les eaux marines, douces et saumâtres, de profondeurs faibles jusqu'à plus de 5 000 m de fond, sous tous les climats.
Elles ont une importante action dans la filtration de l'eau.
Une éponge haploscléride
MorphologieLes éponges sont des animaux généralement fixés.
Elles peuvent avoir un port rampant (forme encroûtante) ou dressé (en coupe, en amphore, en boule ou ramifiée). Chez les espèces ramifiées, les rameaux peuvent se disposer en touffe (formation de ramification dans tous les plans de l'espace) ou sur un seul plan (forme en éventail, ex Janthella) ; les rameaux peuvent rester isolés, ou s'anastomoser (ex Clathrina).
Elles sont généralement colorées, en jaune, brun, rose, rouge, violet, bleu ou vert, mais elles peuvent aussi être blanches ou blanc grisâtre. La coloration peut être due à des pigments, mais aussi à des sels métalliques (de fer par exemple), voire à des algues ou bactéries symbiotes.
Les éponges forment l'organisation la plus simple: ce sont des colonies de cellules peu différenciées, sans agencement fixe. Ce sont des animaux qui ne possèdent ni appareil génital, ni appareil respiratoire, ni appareil excréteur ou génital. Le système nerveux est très primitif et diffus.
Elles ne possèdent ni bouche, ni anus, ni d'ailleurs aucun organe différencié.
La fonctionnalité essentielle acquise par les éponges est simple: c'est la capacité qu'ont leurs cellules de se spécialiser et de vivre en société. La capacité pour des cellules de se différencier suivant leur position dans un groupe est déjà observable chez les protozoaires, mais les éponges systématisent cette organisation, et la rendent permanente.
Les différents groupes d'éponge au sens strict se caractérisent par la nature du squelette interstitiel (spicules) que ces colonies utilisent pour acquérir une structure rigide: calcaire, chitine ou silice. L'avantage sélectif d'une structure rigide est dans la protection qu'elle apporte: elle est plus difficile à brouter pour un prédateur.
Comme toujours à long terme, le succès évolutif n'a finalement pas été dans ces structures rigides et protectrices. Le succès évolutif a été dans des structures souples capables de mouvements, que l'on retrouve avec les Cnidaires.
La texture de leur surface dépend de la présence ou non de spicules sur l'animal. Une surface lisse correspond à l'absence de spicules dans la couche périphérique de l'éponge (ectoderme).
Un aspect "hirsute" (hispide) est généralement dû à la présence de spicules en surface, faisant saillie. Ces spicules peuvent être dressés de façon aléatoire, ou selon une organisation qui confère à la surface un aspect géométrique ou régulier.
La consistance de l'éponge dépend aussi de la nature du squelette interne, mais aussi d'autres facteurs : seules les éponges possédant de la spongine sont élastiques. Leur dureté et leur résistance mécanique varient en fonction de la nature, de la densité et de la disposition des spicules, mais aussi selon la quantité de collagène ou de spongine. Certaines éponges sont visqueuses ou collantes, du fait de la production de sécrétions diverses par des cellules spécialisées.
Haliclona
Anatomie Structure comparée des types :
asconoïde (A),syconoïde (B),leuconoïde (C).
1) spongocoele ou atrium
2) oscule
3) tube vibratile ou tube radiaire
4) corbeille vibratile
5) pore inhalant
6) canal inhalant.
Les choanocytes sont figurés en rouge
Les différents types d'organisation L'évolution a fait en sorte qu'il est possible de reconnaître trois formes corporelles chez les porifères.
La forme asconoïde, la plus simple des trois, ne se rencontre que chez les plus petites éponges et se caractérise par des ostia menant directement au spongocoele, lequel est tapissé de choanocytes.
La forme syconoïde représente une évolution par rapport à la première forme, car les choanocytes ne tapissent plus le spongocoele mais plutôt une multitude de petits canaux radiaires, ou corbeilles vibratiles, qui ont pour avantage d'augmenter la surface de contact entre l'eau et les cellules de l'animal, permettant une plus grande absorption de nourriture.
Finalement, la forme leuconoïde est la plus complexe, avec les ostia et canaux menant à de nombreuses corbeilles vibratiles tapissées de choanocytes. On rencontre cette forme chez les grosses éponges coloniales.
eponge_hemimycale
Les éponges, animaux diploblastiques, sont constituées de deux couches de cellules :L'ectoderme, aussi appelé feuillet externe ou couche dermale, est constitué de cellules épidermiques appelées pinacocytes. Elles forment un épithélium unistratifié, à une seule couche de cellules. Ces dernières sont plates, jointives, et recouvertes d'une très fine cuticule. Elles laissent par endroit place à l'ouverture d'un pore inhalant.
L'endoderme, aussi appelé feuillet interne ou couche gastrale, est formé de cellules à collerette appelées choanocytes, qui présentent une ressemblance troublante avec des choanoflagellés. Le flagelle des choanocytes est utilisé pour assurer une circulation d’eau dans l'éponge, assurant ainsi indirectement la capture de nourriture, l'apport en dioxygène et l'éjection des déchets. Le choanocyte a aussi un rôle direct dans la nutrition (voir le paragraphe Alimentation)
Ces deux couches cellulaires sont séparées par une couche sans réelle structure, semblable à de la gelée, la mésoglée, qui contient différents types de cellules:Les scléroblastes produisent de minuscules aiguilles (spicules) qui peuvent être calcaires (carbonate de calcium) ou siliceuses (silice amorphe, appelée opale). Les spongioblastes produisent des fibres entrelacées de spongine, scléroprotéine soufrée riche en iode (de 8 à 14 %), apparentée au collagène. Spicules et fibres renforcent et rigidifient la structure. Les spicules sont isolés ou soudés les uns aux autres en une armature rigide.
Les porocytes, qui sont des cellules creuses, permettent le passage de l'eau entre l'ectoderme et l'endoderme. Dans le type asconoïde, les porocytes mettent directement en communication la cavité interne (atrium ou spongocoele) avec l’extérieur. Dans les types plus complexes (syconoïde et leuconoïde), l'eau entre par des orifices inhalants (ostia), reliés à des canaux inhalants qui desservent les pores inhalants des porocytes ; l'eau passe alors dans une corbeille vibratile tapissée de choanocytes (endoderme), puis sort dans l'atrium par un canal exhalant. La multitude de pores permet à l’eau de traverser les différents tissus cellulaires pour arriver dans l’atrium. L’eau est ainsi filtrée puis évacuée dans l'atrium puis vers l'extérieur par un orifice plus gros (l’oscule). Selon la complexité de l’éponge, celle-ci peut présenter un ou plusieurs oscules.
Les amibocytes (ou amœbocytes) sont des cellules capables de se déplacer comme des amibes, d'où leur nom. Peu différenciées, ces cellules seront capables de se dédifférencier en archéocytes, cellules totipotentes, qui elles-même pourront se différencier en n'importe quelle cellule spécialisée, comme par exemple en gonocytes (qui assurent la reproduction), en phagocytes (qui assurent l'alimentation), en myocytes (cellules contractiles, essentiellement présentent autour de l'oscule, servant à la contraction musculaire), etc.
Les cellules nerveuses forment un tissu nerveux diffus et très rudimentaire. Elles relient les pinacocytes de surface avec les choanocytes.
Les collencytes sont des cellules dont les ramifications anastomosées sécrètent la gelée polysaccharidique qui constitue la mésoglée.
La Clione
Comportement Alimentation La très grande majorité des éponges sont suspensivores et consomment principalement des bactéries, des débris organiques et des algues unicellulaires. Une éponge d'un volume de 10 cm³ peut filtrer 22 litres d'eau par jour. Certaines espèces pourraient même filtrer 10 000 à 20 000 fois leur volume d'eau en une seule journée. Seules les particules de diamètre inférieur à 50 µm seront aspirées. Celles dont le diamètre varie entre 1 et 50 µm seront phagocytées par des amibocytes, celles dont le diamètre est inférieur à 1 µm seront phagocytées par des choanocytes.
1: l'eau, chargée de particules en suspension, entre par les pores inhalants.
2: les grosses particules sont phagocytées par les amibocytes.
3 et 6: les particules organiques subissent une digestion intracellulaire dans les vacuoles digestives des amibocytes.
4: les particules inorganiques (par exemple les grains de sable) sont expulsées vers le pore exhalant.
5: les petites particules parviennent jusqu'à la corbeille vibratile, où elles sont phagocytées par les choanocytes, puis transférées à des amibocytes.
Cette stratégie ne demande ni structure complexe, ni mouvement coordonné. Cependant une découverte récente fait état de l'existence d'une éponge carnivore, qui capture de petits crustacés grâce à ses spicules, qui agissent comme des crochets sur la carapace de ses proies.
eponge en tube performante
Capacités de résistance et de régénération Les éponges sont capables de se régénérer, même si elles sont écrasées, râpées et tamisées afin de dissocier complètement les cellules (expérience de Wilson, Galstoff et Fauré-Frémiet): les cellules sont capables de se réassocier spontanément pour former de nouveaux individus.
Ces capacités sont utilisées pour multiplier les éponges de toilette par une méthode appelée "bouturage" (qui diffère du bouturage chez les végétaux): les individus de bonne taille et de bonne qualité sont coupés en morceaux (en général en 4 ou 8), puis taillés en forme sphérique ; chaque morceau redonnera un individu entier en reprenant sa croissance.
Elles peuvent aussi subir une déshydratation importante (être hors de l'eau) pendant plusieurs années et revivre une fois replongées dans leur biotope naturel. Elles possèdent aussi une forme de résistance et d'attente appelée gemmule (voir le paragraphe "Reproduction asexuée"). En revanche, elles sont généralement très sténohalines (elles ne supportent pas les variations de salinité).
Selon des études récentes, les éponges peuvent atteindre des âges très avancés, surtout celles vivant dans les océans froids et qui ont une croissance très lente. Cette étude estime l'âge des Cinachyra antarctica (Démosponges) de grandes tailles à environ 1 550 ans (entre 1 050 et 2 300 ans), et celles des plus grandes Scolymastra joubini (Hexactinellides de la famille des Rossellidae) à au moins 13 000 ans (âge minimum donné par la modélisation) et au plus 15 000 ans (âge au delà duquel la zone de vie des specimens étudiés était exondée) Cela ferait de ces éponges les plus vieux êtres vivants au monde.
Réseau de spicules formant le squelette interne d'une éponge siliceuse
Reproduction Reproduction sexuée Les éponges peuvent être gonochoriques (cas général chez les éponges calcaires) ou hermaphrodites (cas général chez les éponges siliceuses). Les gamètes (spermatozoïdes et ovules) proviennent de la différenciation de certains amibocytes. Selon d'autres auteurs, ils proviendraient d'amibocytes ou de choanocytes dédifférenciés[9].
Si, dans ce groupe, la spermatogenèse est classique, l'ovogenèse présente des particularités. Lorsque les ovocytes I sont formés, chacun s'associe à deux choanocytes dédifférenciés qui seront annexés par l'ovocyte.
Autre particularité, les éponges présentent une fécondation indirecte : les spermatozoïdes, expulsés par un individu et ayant pénétré dans une autre éponge, seront capturés par des choanocytes différenciés. Ces derniers se dédifférencient en archéocytes, deviennent alors mobiles, pénètrent dans la mésoglée où se trouvent les ovules, et y transportent les spermatozoïdes.
Les éponges sont le plus souvent vivipares : après la fécondation, l’œuf se développe dans la mésoglée puis devient une larve nageuse (larve amphiblastula chez la plupart des espèces, ou parenchymula chez certaines éponges siliceuses), recouverte de flagelles, qui est libérée dans le milieu extérieur. La faible proportion de larves qui réussissent à survivre vont se fixer sur un support et se métamorphoser en éponge adulte.
Reproduction asexuée Les éponges peuvent aussi se reproduire ainsi de façon asexuée. Des fragments détachés peuvent reformer une éponge entière (voir le paragraphe "Régénération"). Elles peuvent aussi produire des bourgeonnements de cellules indifférenciées, protégées par une coque solide, l'ensemble étant appelé gemmule (sauf chez certaines Hexactinellides, où ces "bourgeons" possèdent des cellules déjà différenciées et sont appelées sorites). Les gemmules (ou sorites) sont généralement libérées à la mort de l'individu et, si les conditions sont favorables, s'ouvriront et donneront de nouveaux individus.