Il fait et défait les fortunes en un rien de temps et peut conduire tout droit en prison sans passer par la "case départ" sous la pression des créanciers ou de la malchance : le Monopoly, jeu de société au succès mondial, fête son 70e anniversaire dans une forme éclatante.
Créé aux Etats-Unis par Charles Darrow, un ingénieur au chômage, le Monopoly a d'abord été refusé par les premiers industriels du jouet pendant un an.
Avant de décider de produire le jeu, le fabricant Parker avait renaclé, détectant 52 "erreurs fondamentales" dans sa conception, dont la durée excessive des parties.
Edité depuis en 26 langues dont le breton et le corse, le jeu qui glorifie le capitalisme et la ruine de l'adversaire, a été vendu à plus de 250 millions d'exemplaires à ce jour, selon son éditeur Hasbro.
Chaque année, 500.000 boîtes sont vendues, rien qu'en France.
"La recette de cet incroyable succès est que le Monopoly est avant tout un jeu transgénérationnel, associant toute la famille dans une même égalité des chances, des petits enfants à partir de 8 ans aux arrières grands-parents", estime Yves Cognard, directeur du marketing de Hasbro France.
Boudé souvent par le monde communiste et ses sympathisants les plus orthodoxes, le Monopoly se heurte toujours aux frontières cubaines : Fidel Castro ordonna même la destruction de tous les exemplaires à Cuba.
Le jeu a été interdit en ex-Union soviétique jusqu'à la Perestroïka.
"Avec ses différentes versions adaptées aux capitales, le Monopoly est un excellent indicateur des mutations du monde", font remarquer Marie-Françoise Fleury et Hervé Théry, professeurs de géographie et sociologie et auteurs d'une étude publiée en 2002 dans la revue scientifique "Mappemonde".
Dans une autre sphère, Churchill était un adepte impénitent, tout comme Onassis qui a peut-être testé ses meilleures stratégies de placements sur le plateau de son exemplaire personnel.
Apprenant que Maria Callas était aussi adepte de la "caisse de communauté", le milliardaire grec lui offrit un Monopoly en or et diamants d'une valeur de 2 millions de dollars.
Pour gagner au Monopoly, un seul objectif : conduire à la faillite ses avdersaires par tous les moyens.
Le règlement officiel se contente avec diplomatie d'inviter les joueurs "à devenir le plus riche en achetant et louant des propriétés de manière profitable dans un jeu de commerce, d'adresse et d'agrément".
La pédiatre Edwige Antier ne voit aucune contre-indication au jeu de Monopoly, au contraire : "ce jeu repose sur le rêve de puissance, pas sur l'avarice, ce qui serait nettement plus pervers.
Indispensable au développement psychique de l'enfant si faible par définition, le rêve de puissance est un besoin aussi profond qu'est ancienne l'humanité", a-t-elle indiqué.
Rançon de la gloire, le Monopoly est souvent copié, mais également détourné : l'éditeur Hasbro a demandé l'interdiction aux Etats-Unis du "Ghettopoly", une version pirate avec des feuilles de marijuana en guise de jetons. Le vainqueur est toujours le plus riche, mais par le vol, le mensonge et la débrouille.
De son côté, "L'Anti-Monopoly" divise les joueurs en deux camps : les monopolistes et les libres concurrents.
A l'occasion de ce 70e anniversaire, Habsro organise dans plusieurs pays un jeu concours.
En France, en partenariat avec M6 et Europe 1, une maison d'une valeur de 150.000 ? est mise en jeu. Soucieux de faire fructifier son patrimoine, le lauréat n'oubliera certainement pas d'encaisser ses loyers !